DROIT ET FISCALITE PAR EMILE MBANDJI

DROIT ET FISCALITE  PAR EMILE MBANDJI

Droit du Commerce International: La Formation du contrat commercial international

LA FORMATION DU CONTRAT COMMERCIAL

INTERNATIONAL

 

En droit interne les contrats ne sont pas toujours précédés d'une période de négociation. Il n'y a pas de négociation préalable au contrat d'adhésion (l'offre n'est pas négociable) ou au contrat forcé (bail forcé de logement de famille).

Dans le commerce international, la négociation n'est pas toujours indispensable: contrat simple à prestation isolée ou quand la naissance de l'obligation dépend d'un événement extérieur (financement par concours d'un tiers).
Dans ce cas, les parties peuvent tout de suite signer le contrat sous condition suspensive (octroi de crédit, obtention de concours de tiers, de l'autorisation gouvernementale).

Il en est autrement si la réalisation même du contrat nécessite des études portant sur le projet, le produit, le marché, l'environnement ou si les parties qui ne sont pas de force trop inégale envisagent une longue coopération ou la conclusion de plusieurs contrats qui doivent être coordonnés entre eux par un premier contrat de base.
En pareil cas, le contrat se forme peu à peu en négociant. La négociation est nécessaire pour arriver au négotium (acte juridique).
Etude de la formation progressive d'un contrat complexe (un seul contrat avec plusieurs obligations) et d'un complexe de contrats (théorie du contrat cadre).

Section I : La formation progressive d'un contrat commercial international

La négociation peut être orale ou jalonnée par des écrits.
La pratique connait une variante de ces documents précontractuels avant de s'interroger sur la qualification.

Sous-section I : Diversité des documents précontractuels

Pour s'expliquer sur leur projet, les parties échangent des lettres appelées lettres d'intention ( " letters of understanding " ).
Elles sont appelés ainsi car elles expriment un désir, une intention et surtout parce qu’elles s'expriment de manière non formelle.
Elle peut être adressée par un 1/3 pour encourager une partie à contracter.
Les lettres d'intention sont destinées soit à organiser la négociation soit à préparer le futur contrat.

  • A) Les documents précontractuels

 

  • Les premiers contrats de travail portent sur les points suivants:
  • Objectif à atteindre.
  • Calendrier, échéancier: procédure de négociation
  • Etudes: la prise en charge du coût de ces études ou la répartition de la prise en charge
  • La communication de renseignements, de savoir-faire.
  • La confidentialité.
  • L'exclusivité: ne pas entamer des négociations avec d'autres concurrents.

 

  • B) Documents de préparations du futur contrat
  1. L'offre

Manifestation de volonté unilatérale qui ne se suffit pas à elle-même, l'offre est une proposition simple et précise.
Elle se distingue de la simple invitation d'entrée en pourparlers qui manque de précision.
Le destinataire peut la rejeter, l'accepter purement et simplement ou l'accepter avec modification. Si les modifications sont substantielles, elles constituent une contre-offre.

  1. Le pacte de préférence

C'est une promesse de priorité: promesse d'offrir le contrat si le promettant se décide un jour à contracter.
Ce n'est pas une promesse de contracter sur le champ puisque la décision de contracter n'est pas encore prise.
Le promettant ne doit pas accepter une offre qui émane d'un tiers et ne doit pas adresser l'offre à un tiers avant d'offrir le contrat en premier lieu au bénéficiaire du pacte.
En tout cas le promettant ne peut pas traiter avec autrui à des conditions plus avantageuses que celles proposées au bénéficiaire du pacte.

  1. L'accord de principe

Les parties peuvent se mettre d'accord sur le principe de contracter dès que la conjoncture économique le permettrait.

  1. L'accord partiel

Il porte sur des clauses accessoires du contrat ou comporte le bilan des résultats déjà acquis au cours de la négociation.

  1. Le projet de contrat

Il suppose que les négociations soient dans un stade avancé. Il existe un accord sur les clauses essentielles du contrat mais il reste à régler quelques détails ou à rédiger un instrumentum ( qui désigne "le support matériel qui constitue la preuve d'un évènement ou du contenu des conventions conclues entre les parties". ) ou la soumission du projet de contrat à l'agrément du conseil d'administration ( quand la négociation est menée par les représentant des parties qui n'ont pas le pouvoir d'engager l'entreprise ).

  1. L'avant contrat

Les contrats avancés peuvent aboutir à des accords qui constituent des avant-contrats (promesse unilatérale de contrat/synallagmatique) et à des contrats conditionnels.

Sous-section II : La qualification des documents précontractuels

Qualifier c'est ramener le contrat à l'abstrait, c'est rattaché les faits à une catégorie, à un concept afin d'appliquer le régime juridique de cette catégorie ou de ces concepts.
Ces documents précontractuels ont-ils une valeur juridique ? Les propositions qui y sont échangés forment-elles un contrat au sens classique de l'article 1101 du code civil ("le contrat est un accord créateur d'obligation").
Ces documents créent-ils des obligations, contrats qui créent des obligations de la négociation, ou contrat préliminaire qui crée l'obligation de passer le contrat définitif ?
Le juge peut-il compléter un contrat inachevé ?
La qualification s'effectue selon la "lex fori" c'est à dire la loi du juge saisi.

  • A) La qualification du document précontractuel en droit comparé
  1. La qualification en droit anglais

Les documents qui organisent la négociation n'ont en droit anglais aucune valeur contractuelle. Ils sont "subject to contract" (c'est à dire à condition qu'un contrat soit conclu) c'est à dire que ces documents sont de simples instruments de travail.
Il n'y a aucune obligation de continuer la négociation ni de négocier sur une base raisonnable donc aucune force contraignante: ce sont des " gentlemen's agreement " (simples engagements d'honneur et non de véritables engagements juridiques).
On peut sentir un paradoxe: engagement sur la base de la morale affaiblit l'engagement sur la base juridique. L'accord précontractuel sera considéré comme contrat s'il porte sur un point précis (ex: secret, exclusivité) et s'il y a une "considération".
Ce qui compte c'est le contrat définitif car même après la conclusion du contrat, les documents précontractuels n'entrent pas en compte même pour interpréter le contrat.

  1. La qualification en droit allemand

Les allemands ont imaginé l'existence d'un contrat de négociation qui se forme pendant les pourparlers. Il en résulte l'obligation de négocier de bonne foi.
La violation de cette obligation engage la responsabilité contractuelle ( " culpa in contrahendo" de Rudolf Von Thering").

  • B ) La qualification en droit français

La position en droit français est intermédiaire entre droit anglais et droit allemand. Il ne nie pas toute valeur aux documents précontractuels à la différence du droit anglais. Ils peuvent toujours servir à interpréter le contrat définitif une fois formé sauf disposition expresse des parties visant à les annihiler.
Mais le droit français à la différence du droit allemand ne va pas jusqu'à reconnaitre l'existence d'un contrat de négociation dans les simples documents destinés à organiser la négociation. Le problème est plus compliqué pour les documents ayant pour but de préparer le contrat définitif.

 

  1. Les documents d'organisations de la négociation

Le principe de la liberté de négociation: dans la doctrine française, les pourparlers sont au contrat ce que sont les fiançailles au ménage.
Le principe est donc la liberté de rompre sans abus.
La liberté contractuelle implique la liberté de négocier, de comparer les offres et de rompre les négociations avancées si les inconvénients de l'opération projetée n'apparaissent que tardivement. Mais la liberté a des limites: il doit se comporter loyalement, être de bonne foi.
Si la rupture des négociations n'est pas en soi fautive, la responsabilité peut être engagée en raison des circonstances qui ont entouré la rupture. A défaut de contrat, cette responsabilité n'est contractuelle mais délictuelle.

  1. La faute délictuelle

La faute qui engage la responsabilité délictuelle consiste dans un comportement déloyal. Elle peut exister au début de la négociation (ex: entrer dans la négociation uniquement pour arracher des secrets ou neutraliser un adversaire en l'empêchant de négocier avec autrui).
La faute peut exister pendant la négociation (formation de propositions inacceptables qui ne peuvent conduire qu'à l'échec; entretenir de faux espoir en la conclusion du contrat alors qu'on a pris la décision de rompre).
On peut aussi tenir compte des déclarations désobligeantes de nature à porter atteinte à la réputation du partenaire.

  1. La sanction

Le juge ne saurait forcer les parties à continuer à négocier ( " Nemo Potest Logi Ad Factum " ).
La réparation n'est donc pas en nature mais par équivalent. Elle couvre l'intérêt négatif à savoir les pertes subies (frais engagés...) mais pas les intérêts positifs (les gains escomptés de l'opération manquée).La sanction peut consister dans la nullité du contrat conclu à la suite d'une faute antérieure commise pendant les pourparlers (ex: communication de faux renseignements).
Les clauses d'exonération de responsabilité en cas de faute prouvée restent sans effet.

  • C) Les documents de préparation du futur contrat

Deux hypothèses:
-Ils sont clairs sur la force obligatoire (clause claire et précise).
-Ils sont ambigus.

a) Les documents clairs

Selon le principe classique, la qualification est une question de droit qui doit être réglée par le juge seul qui doit donner ou restituer aux actes leur exacte qualification. Il doit écarter la dénomination qui lui parait non conforme.

-Article 12 alinéa 4 du Nouveau Code de Procédure Civile: les parties peuvent en vertu d'un accord exprès et pour les droits dont ils ont la libre disposition, lier le juge par la qualification qu'elles estiment la plus appropriée.

Les parties sont libres de retirer par mention expresse toute forme contraignante à leur accord en employant les formules "bon pour lettre d'intention" ou "sans engagement contractuel".

Ils sont libres de placer leur accord hors du droit en les considérants comme des engagements d'honneur à l'instar du "gentleman agreement".

La seule limite est de tenir compte de l'OP du juge de l'exequatur.

Mais il est préférable d'éviter les ambigüités et de dire à quoi on s'engage.

  1. b) Les documents obscurs

On veut bien promettre des prestations déterminées. Par exemple telle fourniture ou telle assistance, mais on veut n'y être tenu que dans la mesure de ce qu'on peut faire.

Formules telles que "on fera tout ce que l'on pourra pour s'entendre", "on fera de son mieux" ou "en tant que de besoin".
On voudrait être lié sans l'être.

Dans l'idéal chaque contractant voudrait obliger l'autre sans s'obliger lui-même. Un élément contractuel peut, en raison de son autonomie, détacher, isoler et sauver et cet élément est la clause d'arbitrage.

-->Donc au fond de l'affaire, deux théories s'affrontent:
-*Une abstraite: elle affirme l'existence de l'engagement malgré l'incertitude de la volonté.
-*Une réaliste: qui se prononce en sens contraire.

  1. c) La théorie abstraite

Affirmation de l'engagement malgré l'incertitude de la volonté. Dans cette théorie, plutôt dominante, l'acte juridique est une donnée objective qui transcende la volonté individuelle. L'acte juridique a une signification sociale qui s'attache plus à la volonté déclarée qu'à la volonté interne.
L'engagement existe si ces ingrédient sont réunis (consentement, capacité, cause, objet) peu importe que l'une des deux parties ne veuille pas s'engager vraiment. Il en est de même si cette volonté est douteuse.
A l'appui de cette théorie, il y a les arguments suivants:

-->Art 1157 du code civil: quand une clause est susceptible de deux sens on doit plutôt l'entendre dans celui avec lequel elle peut avoir quelque effet plus que selon celui où elle ne peut n’en produire aucun.
L'affirmation de l'existence de l'engagement de nature à donner un effet à une clause ambigüe serait toujours préférable à la négation de l'engagement qui risquerait d'aboutir à la perte de la clause.

-->Maxime selon laquelle celui qui veut le principe veut les conséquences. Elle a pu être invoquée pour qualifier comme accord de principe la déclaration faite par une entreprise à son salarié de son intention de la convoquer ultérieurement si les circonstances le permettent.
Dans cet accord on a voulu tirer l'engagement de discuter les modalités de l'embauche.

-->Art 1583 du code civil: il subordonne la perfection du contrat de vente à l'accord sur les éléments essentiels ( chose et prix ).
Les difficultés qui surgissent quant aux clauses accessoires (modalités de date, de livraison ou modes de paiement). N’empêchent pas le contrat de se former. On peut y remédier par les règles supplétives.

-->Art 1589 du code civil: la promesse de vente vaut vente. La vente est donc parfaite par le seul accord sur le prix et sur la chose même si les parties n'ont pas voulu s'engager immédiatement. L'existence de l'engagement est de déclencher indépendamment de la volonté.

  1. d) La théorie réaliste

La négation de l'engagement en cas de doute: "in dubio pro libertate".

Selon la théorie réaliste, l'engagement étant une restriction à la liberté il ne peut être dégagé de documents ambigus ou des situations incertaines.

Il est vrai que la volonté des contractants n'est pas toujours strictement respectée (ex: l'article 1872-1 alinéa 2 code civil: il rend le contrat de société de la S.E.P, accord occulte, inopposable aux tiers si les participants ont pris à leur égard la qualité d'associés).
Cet article s'explique par l'apparence de société dont les tiers étaient témoins.

Les documents précontractuels ambigus sont confidentiels et ne créent pas l'apparence susceptible d'engendrer des engagements forcés.

Dans certains cas l'engagement peut être créé malgré l'ambiguïté en vertu du principe: le doute doit être interprété contre le rédacteur. Mais ce principe est conçu dans le contrat d'adhésion afin de protéger la partie la plus faible contre la partie la plus forte.
Or il n'y a pas lieu d'appliquer ce principe quand les parties sont à égalité et c'est souvent le cas en droit du commerce international). La seule maxime pertinente en présence de documents douteux est la suivante: "in dubio pro libertate" (le doute s'interprète contre l'engagement pour la liberté).

Pas d'engagement sans volonté réelle et certaine. Il est préférable de nier l'existence d'une obligation que l'on a voulu contracter que d'affirmer l'existence d'une obligation que l'on n'a pas voulu prendre.

Quelques arguments pour justifier cela:
-->Les accords dépourvus de force obligatoire ne sont pas pour autant dépourvus d'effets. Ils ont pour utilité de faire le point et de fixer les idées.
-->Les parties peuvent être d'accord sur les conditions du contrat sans donner encore leur consentement au contrat lui-même.
Il en est ainsi si elles communiquent des informations à faire figurer dans un contrat ultérieur sans avoir la volonté de s'engager tout de suite (Cour d'Arbitrage de Paris 15 fév 1927).

Il serait hasardeux de fonder l'engagement sur des déclarations ambigües telles "laisser votre adresse, votre fax, on vous écrira" (désir ardent de temporiser ou de se débarrasser d'un interlocuteur gênant).

-->Article 1583: propre à la vente peut être étendu au contrat simple (par analogie) mais ne convient pas aux contrats commerciaux complexes où les clauses accessoires peuvent avoir une grande importance.

-->Art 1589: assimilant la promesse synallagmatique de contrat au contrat lui-même, cet article a été conçu pour renforcer le consensualisme proclamé par le code civil en 1804: la promesse de vente se suffit à elle-même, nul besoin d'aucune condition de forme. Cet article ne permet pas d'affirmer que l'on puisse affirmer l'engagement sans égard à ou contre la volonté.

Un accord peut exister sur le plan matériel sans exister sur le plan juridique (ex: si les parties subordonnant la perfection de l'accord à la rédaction d'un écrit particulier acte sous seing privé, acte notarié).
Tant que l'écrit n'a pas été dressé le contrat fait défaut. La promesse ne suffit pas à elle-même (existence matérielle mais pas juridique).Cela doit être le même cas pour les documents où les termes sont vagues et incertains. On peut déceler une communauté de vues, des accords inachevés mais l'engagement ne doit pas se reposer que sur des certitudes.
A quoi peut servir de se mettre d'accord sans s'obliger nettement ? On a du mal à concevoir dans le monde des affaires, des accords sans obligation pour faire un peu le point ou pour fixer des idées.
A un accord élémentaire on veut à tout prix attacher une quelconque obligation. La volonté pure et simple de négocier se transforme en obligation de négocier. Or on ne saurait pas convenablement obliger les gens à négocier, à dialoguer.
En outre qui dit accord auquel une obligation est affublée dit par la même occasion contrat obligatoire. La seule variante du contrat envisagé par l'article 1801 du code civil. Il y a des contrats qui ne sont pas créateurs d'obligation mais créateur de normes.

 

Section II : La formation progressive d'un complexe de contrats ou théorie du contrat cadre

 

Il suppose une pluralité d'actions ou de contrats futurs.
Dans un premier stade les parties envisagent des rapports d'échange qui s'étalent dans le temps ou un projet de coopération à long-terme qui fait renaître un faisceau d'actes ou de contrats mais elles ne sont pas en état d'entrer dans le détail et les conditions des actes soit parce qu’elles se heurtent à des difficultés techniques, économiques ou d'autres qu'elles ne maitrisent pas encore, soit parce qu’elles pensent que les circonstances vont changer au risque de bouleverser les prévisions initiales et que par conséquent elles ne souhaitent pas maintenant prendre un engagement ferme encore moins s'engager une fois pour toute.

Elles s'entendent donc sur quelques grandes lignes à observer et à réviser ultérieurement quand elles se décideront à passer les actes et le contrat futur lesquels vont se construire au fur et à mesure en fonction des besoins et des circonstances variables.
Le contrat cadre est donc un accord qui fixe les objectifs, les principes destinés à régir une série indéfinie d'actes ou de contrats futurs. C'est un accord global dont la mise en œuvre exige une nouvelle manifestation de volonté.
Le contrat cadre est un contrat d'une durée destiné à satisfaire des besoins périodiques. Mais tout contrat de durée n'est pas un contrat cadre.

Le contrat de fourniture est un contrat de durée. Mais ce contrat contrairement à la thèse "SEHBE" n'est pas toujours un contrat cadre. Certains contrats de fourniture sont formés par la conclusion d'un seul et unique contrat. Il en est ainsi du contrat de fourniture de gaz et d'électricité. On ne conclut pas un nouveau contrat chaque fois qu'on forme et on ouvre le bouton de gaz ou d'électricité.
Il en serait autrement si les besoins à satisfaire ou les conditions de satisfaire ce besoin ne sont pas identiques quantitativement au qualitativement. Il faut à chaque commande négocier au cas par cas (contrat d'approvisionnement à long terme portant sur des matières versatiles). Le contrat cadre prend de l'ampleur dans le commerce interne: contrat de concession, contrat de pompiste de marque, contrat de franchise, contrat d'ouverture de crédit (sous-traitance).

Il prend aussi de l'ampleur dans le commerce international. Il peut être passé soit entre une entreprise nationale et une entreprise étrangère, soit entre un état et une entreprise privée ("State Contract"), soit entre deux états en prévoyant que l'accord sera mis en œuvre par leurs ressortissants.

Dans le contrat cadre au sens large, il faut distinguer l'accord fondamental, l'accord inaugural et les multiples actes, accords particuliers appelés parfois contrats d'exécution.
Le contrat cadre au sens strict ne suffit pas à lui-même alors que le contrat d'application peut se suffire à lui-même. Le premier est un contrat innommé alors que le second est un contrat nommé.

Le contrat cadre au sens strict joue le rôle d'une loi privé (Demogue).
Le contrat cadre à une structure hypothétique et catégorique. Le contrat cadre à une fonction normative. Il crée des normes. C'est un contrat normatif ("Normentvertrag") alors que les contrats particuliers créent des obligations. Le contrat cadre engendre un système (ensemble d'éléments en interaction "Luhmann").

Le système se définit aussi par l'autocréation, l'autoproduction, l'autoréférence, l'auto-...
Le contrat cadre ne règle pas toutes les conditions des futurs contrats, il comporte des éléments indéterminés, des espaces libres, des "spielraum" (espace remplis lors de la conclusion de contrats particuliers).Le contrat cadre au sens strict est aussi un contrat de coordination. Non seulement il contient des normes qui vont régir les futurs actes juridiques (fonction normative) mais il a aussi pour rôle d'ordonner les relations entre ces actes juridiques (fonction de coordination).

Sous-section I: La fonction normative du contrat cadre

Se prépare une série indéfinie d'actes en définissant les normes qui vont les régir. Mais il n'est pas une modèle normatif ni préparatoire comme un autre.

  • A) Distinction entre contrat et les autres modèles
  1. Le contrat cadre et l'acte règle

Il a été assimilé à l'acte règle (ex: statut général des fonctionnaires) à qui il manque l'acte-condition (ex: l'acte de nomination de fonctionnaire).
Mais l'acte condition est un acte d'adhésion au statut sans possibilité de modifier ou de compléter les statuts. Le contrat d'application peut apporter des modifications et des compléments au contrat-cadre.

  1.   Contrat cadre et la convention collective

Il peut prendre la forme d'une convention collective (ex: convention collective passée entre le concédant et l'ensemble des concessionnaires. Le concessionnaire traite sur le même pied d'égalité que le concédant).
La convention collective peut prendre la forme d'un contrat cadre. Il en est ainsi lorsque la convention collective ne suffit pas à la même et qu'elle a besoin d'être complétée (ex: la convention nationale de travail complétée par un accord de branche ou d'entreprise).
Mais différence: le contrat de travail peut déroger à la convention collective seulement dans un sens favorable au salarié et c'est différent du contrat d'application qui peut déroger plus librement au contrat cadre).

3      Contrat cadre et les conventions d'investissements

Les conventions d'investissement entre deux états constituent des contrats cadre si elles ont pour objet de régir des contrats conclus par exemple entre leurs entreprises respectives. Mais lorsque les conventions collectives d'investissement se bornent à prévoir des modifications, à introduire ou faire introduire des législations internes de chaque pays (ex: modifications fiscales) alors elles ne constituent pas des contrats cadres car elles ne cherchent pas à régir un contrat mais à avoir une influence sur un acte législatif.

4      Le contrat cadre et les conditions générales de contrat

Les conditions générales de constatation sont une volonté unilatérale que le plus fort impose au plus faible alors que le contrat cadre est un contrat négocié.
L'incorporation des conditions générales dans le contrat particulier exige soit une mention expresse (JP: il faut que le cocontractant ait la possibilité de connaitre ces conditions et qu'il les ait acceptées) soit que ces conditions se soient transformées en usage généralement admis dans le milieu professionnel. Or il n'y a ni besoin de mention, ni d'usages par application du contrat cadre ou contrat particulier.

5      Le contrat cadre et le contrat type

Le contrat type est un modèle de contrat et non un contrat. Le contrat cadre est en revanche un contrat. Le contrat type est un contrat proposé par un tiers (un organisme professionnel), alors que le contrat cadre est l'œuvre des parties. Le contrat type est un modèle complet alors que le contrat cadre est un accord partiel. En cela le contrat cadre ressemble à un avant contrat mais il s'en distingue profondément.

  • B) Distinction entre contrat cadre et avant contrat

Comme l'avant contrat (ex: promesse unilatérale de contrat), le contrat cadre exige une nouvelle manifestation de volonté. L'un et l'autre peuvent être partiels. Mais là s'arrêtent les points communs. Les deux contrats se distinguent profondément.

-L'avant-contrat est un accord préparatoire d'un seul contrat alors que le contrat cadre prépare une série indéfinie d'actes ou contrats.

-Il y a une identité de nature entre l'avant-contrat (promesse de vente) et le contrat définitif (vente), alors que cette identité n'existe pas toujours dans le contrat cadre qui peut préparer des contrats hétérogènes (vente, assistance, technique, prêt...).

-Le contrat cadre est un contrat normatif qui ne crée pas d'obligations alors que l'avant-contrat crée à la charge des promettant l'obligation de passer le contrat définitif.

-C'est pourquoi le contrat cadre à la différence de l'avant-contrat n'a pas à réunir les conditions de validité du contrat définitif (telle la déterminabilité du prix dans la vente en droit français).Mais rien n'interdit que le contrat cadre soit doublé d'un avant-contrat auquel cas le contrat cadre doit réunir les conditions de validité du contrat définitif selon la loi applicable. L'avant-contrat n'ayant pas de fonction propre, il ne survit pas à la conclusion du contrat définitif. Il disparait au moment de la conclusion du contrat définitif, pareillement selon la comparaison d'un auteur italien, Salandra, à la chrysalide.
Le contrat cadre à une fonction qui lui est propre, il ne disparait pas avec la conclusion du contrat particulier. Il est destiné à assurer la coordination du futur contrat.

Sous-section II: La fonction coordinatrice du contrat cadre

Le contrat cadre sera éventuellement suivi par des contrats particuliers. L'un et l'autre forment un ensemble contractuel: il faut un groupe de contrat. Le contrat-cadre doit organiser les rapports entre ces contrats, indiquer leur indépendance ou leur dépendance.

  • A) Le contrat cadre et les autres ensembles contractuels
  1. Le contrat principal et le contrat accessoire

Le rapport contrat cadre/contrat particulier n'est pas celui du contrat principal par rapport au contrat accessoire.
Le contrat principal tel le prêt peut exister sans contrat accessoire (ex: le cautionnement) alors que le contrat cadre devient caduque si aucun contrat particulier n'est conclu.

  1. Le contrat principal et le sous contrat

Entre le contrat principal (le bail) et le sous-contrat (sous-bail ou sous-traitance), il y a identité de nature. Cette identité de nature fait défaut entre le contrat cadre (contrat normatif) et le contrat particulier (le contrat obligatoire).

  • B) Le rapport entre contrats particuliers présidés par le contrat cadre
    • Le contrat particulier peut être indépendant ou interdépendant.
  1. Indépendance des contrats particuliers

Les contrats particuliers n'ont pas les mêmes conditions et ne subissent pas le même sort.
-Chaque commande donne lieu à des factures différentes, les prix et les quantités sont différentes, la nullité ou la résiliation d'un contrat particulier n'entraîne pas celle des autres.
Un auteur italien compare le contrat cadre au tronc d'arbre et le contrat particulier aux branches. La coupure d'une branche n'a pas d'incidence sur les autres. Mais si le tronc est extirpé, il entraîne dans sa chute les autres branches.

  1. Interdépendance des contrats particuliers

Parfois le succès du projet dépend de l'exécution de l'ensemble des contrats qui deviennent ainsi interdépendants. Il ne sera pas permis de vouloir exécuter certains contrats et s'abstenir d'exécuter tous les autres. Il en est ainsi des accords de coopération interentreprises (ex: accords d'extraction et d'exploitation des mines).



14/12/2011
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